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Lantosque, notre village

 

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Le couvent des Mineurs
Lantosque, notre village
Les gypsiers et plâtriers
La vallée de St Colomban
Belvédère
Mais où est donc
Le patrimoine religieux


Notes critiques de l’œuvre de Passeron 

MERCADIER Daniel [1]

 Dans ce joli coin A ses pieds le torrent gronde
Et serpente entre les près
du monde,
Lantosquois, nous sommes nés.

 

Cette notice s’est largement inspirée du livre édité en 1965 par M. J. PASSERON : Lantosque, notre village », auquel je désire rendre hommage. Nous remercions tout particulièrement Madame OTHO Madeleine pour avoir mis à notre disposition ses archives familiales.

Nous remercions aussi tous ceux qui ont contribué à l’élaboration de ce travail de recherche.

 

Nous vous souhaitons une bonne lecture et, nous espérons qu’à l’avenir nous pourrons apporter de nombreux compléments à l’étude et à la recherche de ce que fut notre village dans le passé.

 

C’est ainsi qu’apparaît, en effet, le village pittoresque de Lantosque au voyageur, qui arrivant des bords de la mer Méditerranée, débouche dans la vallée à l’endroit où elle s’élargit, comme pour les accueillir, après la rude montée de la Giandola. Au fond du tableau les hauts sommets neigeux se découpent sur le ciel bleu. Le village avec ses maisons grises surplombe toujours fièrement la gorge étroite au fond de laquelle gronde le bruyant et rapide torrent.

Notre village, qui fut pendant de nombreux siècles le centre politique de la vallée, le Val di Lantosca, avant que celle-ci ne retrouve le nom des peuples qui y étaient installés avant la romanisation (les vesubianii du Trophée d’Auguste à La Turbie), peut s’enorgueillir d’un passé tourmenté et glorieux.

Mais notre but n’est pas de retracer tous les événements de notre histoire, nous laisserons ce soin à des plumes plus autorisées que la nôtre. Nous n’essaierons pas, non plus, d’ouvrir une discussion sur l’origine du mot Lantosque. Vient-il des guerriers Tosca, Lancia-Tosca, tel que le rappelle la Mémoire Orale ? Lantosque doit-il son nom à la peuplade des Osques amenée dans la vallée par l’empereur Auguste pour repeupler le pays ? La question demeure posée, même si l’imprégnation positiviste de l’historiographie du XIXème siècle correspond parfaitement à l’image qu’ils en laissent.

Le petit ouvrage que nous vous présentons aujourd’hui, mes amis, n’a pas la prétention d’être une monographie de notre village. Nous y avons rassemblé des informations tirées d’une série d’articles parus dans la presse locale, auxquels nous avons ajouté des poésies, en dialecte pour la plupart. Le tout pouvant donner une idée de ce que put être la vie autrefois.

Nous dédions ce petit recueil à la mémoire de nos anciens, qui ont édifié et conservé notre village et qui y dorment de leur dernier sommeil. Il intéressera, nous l’espérons, tous ceux qui ont vécu la vie d’autrefois, et aussi les jeunes, afin qu’ils y puisent l’amour du terroir et le respect du passé.

Je vous livre mon travail, bien modeste, écrit par amour de notre vieux clocher, ce clocher qui m’est cher, comme il doit l’être à vous tous.

 

Que dire de notre village, Lantosque ?

 

En été, on commence dans ce site à éprouver un bien être inexplicable, surtout si on revient d’un séjour sur le littoral, où une chaleur harassante vous accable. L’état de l’atmosphère de la Vésubie avec ses 624 mètres d’altitude y est très variable pendant le cours de l’année, et le thermomètre descend en hiver rarement au-dessous de 0°c. Dans ce magnifique site, le voyageur, le promeneur, trouve toujours bon lit, bonne table, de grandes promenades pour piquer sa curiosité : Lantosque avec ses hameaux, Figaret, Pélasque, Loda, Camari, Saint-Colomban, les quartiers du Villar, les Brucs, les Quinson, la Cabane, la Serisière, Campori, la Villette, le Téron, Saint-Georges, La Fontaine, les Vignes, le Seuil, la Source, les Crottes, le Rivet, la Fouca Saint-Roch, le Martinet et bien d’autres.

Et, sur de très vieux chemins, ceux de nos illustres et bien aimés anciens, vous vous baladerez et rencontrerez des châtaigneraies gigantesques, des oliviers, des arbres fruitiers de toute sorte… Nos châtaignes sont réputées dans toute la région, et toute les années une fête leur est consacrées, et vous viendrez déguster alors, « la castagna roustide ».

Que dire, maintenant des promenades, dans les hameaux de Saint-Colomban ou de Loda. En quelques heures par le chemin de la Maïris, vous irez à Peïra Cava, aux Cabanettes, à Turini, au Camp d’Argent qui est une station d’hiver de l’Authion, où par la rive droite vous vous rendrez aux villages de Lucéram et du Moulinet.

Non loin de là, encore, vous rendrez à La Bollène-Vésubie, village dont vous aurez une très belle vue de Lantosque même. Par l’aval de la vallée vous irez à Saint-Jean La Rivière, Utelle ou même Duranus célèbre par son illustre « Saut des Français ».

Nos fertiles campagnes, nos bergers, nos plateaux, nos vestiges romains, les traces des habitats de ces vainqueurs de la Gaule, les ruines du couvent des moines réformés « Saint-Pancrace », où coule une source excellente. L’église de Lantosque, aussi est à visiter. Elle referme un trésor : un calice en argent doré du XVème siècle. Au début du siècle, encore, les hautes vallées des Alpes Maritimes, communiquaient difficilement avec la côte, les chemins n’empruntaient pas le tracé actuel, ils passaient par les montagnes, les hauts plateaux, les défilés, ce qui rendaient les voyages longs et périlleux. C’est cette situation qui a favorisé le maintien d’un caractère local très marqué, par des coutumes et des traditions très vivaces.

 

Le Val de Lantosque

 

Vaste territoire qui comprend les hameaux de Pélasque, Loda, Saint Colomban et Camari, il est desservi par 25 kilomètres de routes nationales et départementales et par environ 80 kilomètres de chemins vicinaux et ruraux. Notre village produit du plâtre extra-fort, très renommé. Cette production fait encore vivre quelques familles.

 

La vallée de la Vésubie, déjà connue dès l’an 1200, et encore récemment, sous le nom de val de Lantosque était habitée avant l’ère Chrétienne [2]. Ses habitants sont mentionnés sur l’arc de triomphe de Suse et au trophée de la Turbie dont l'inscription nous est rapportée par Pline l’ancien. Au cœur de cette vallée agreste Lantosque se dresse sur un piton rocheux. De son long et brillant passé historique, la petite « république » jalouse de ses prérogatives, ne possède plus que quelques vestiges tendant à disparaître sous les ronces et les éboulis. Parmi ces vestiges : le couvent de Saint-Pancrace [3], fondé par les moines Franciscains Réformés au Fourcat et le château De fortis (appellation commune de château fort) à Loda.

Plus durable fut le prestige de certains de ses fils, dont Ignace Thaon de Saint-André qui fut Vice-Roi de Sardaigne, Johan de Tournefort, abbé de Lérins et Evêque de Nice, Torrini, médecin bien connu du XVIIè siècle, Thaon Ludovic, qui laissa la terrible description du tremblement de terre de 1564 dont les effets catastrophiques se firent particulièrement sentir dans toute la vallée. Dalloni, théologien réputé, Buffon, sénateur, Passeroni Jean-Charles, dont Jean Jacques Rouseau fit l’éloge.

 

Résumé chronologique

 

Dans l’Antiquité et jusqu’à la conquête Romaine, nos ancêtre furent les Ligures [4] ou Liguriens, plus connus sous le nom de Liguriens chevelus Capillati à cause de leur longue chevelure.

 

De 58 à 50, avant Jésus-Christ, ce fut la conquête de la Gaule par les Romains. Notre région y échappe, puisque faisant partie d’une zone non contrôlée jusqu’à la veille de notre ère.

Au Vè siècle, invasion des barbares, dont nous avons du mal à connaître les répercussions pour notre vallée.

Au VIIIè siècle, la pseudo-invasion des Sarrasins que l’historiographie actuelle dément totalement [5], mais dont la mémoire collective, sans doute imprégnée des visions des érudits du XIXème siècle, présente comme ayant « ravagé notre région ».

888, début de la dynastie des Comtes de Provence.

1000, nouveau mythe de « l’Epoque troublée », de l’An Mil, puis rivalité entre Raymond Comte de Provence et le roi Alphonse d’Aragon.

1167, Alphonse d’Aragon est reconnu comme souverain.

1229, Le Val di Lantosque est rattaché à la viguerie de Sospel par des statuts (lois ou libertés) communs.

1257, Le Val de Lantosque passe sous la dépendance de la maison d’Anjou, à la suite de l’héritage de la dernière fille non dotée du Comte Catalan.

1343, mort de Robert d’Anjou auquel succéda sa fille Jeanne.

1382, mort de la Reine Jeanne.

1388, le 13 août, Nice se place sous la dépendance du Duc de Savoie Amédée VII, dit le Rouge. Le Val di Lantosque se place sous le même protecteur, démontrant sa propre autonomie (septembre 1388).

1629, les milices du Val de Lantosque résistent par les armes aux troupes du Duc de Guise, qui tente d’envahir le Haut Comté de Nice.

1691 à 1696, occupation Française, sous le règne de Louis XIV, qui se prolonge au début du XVIIIème siècle par les aléas de la Guerre de Succession d’Espagne.

1792 à 1814, nouvelle occupation Française (révolution Française et Empire).

1860, le 15 avril, Nice et le comté approuvent dans l’enthousiasme le rattachement (on parle alors dans les textes d’annexion) à la France. Il s’agit d’un plébiscite, dont les résultats sont éloquents pour l’ensemble du Comté : Votants :     25933         Pour :      25773    Contre :    160                Nuls :      30

 

Lointains ancêtres

 

Dans les siècles les plus reculés, les habitants de notre région furent, selon l’imagerie, à l’origine, des hordes nomades et belliqueuses ne vivant que de chasse, continuellement en guerre les unes contre les autres.

Au cours des siècles, à ces groupes incultes se mêlèrent des sociétés plus civilisées. Les peuplades primitives, de nos montagnes alpestres, appartenaient toutes à la grande famille des Liguriens chevelus Capillati qui comprenait trois groupes principaux, Védiantins, Alpins montagnards et Saliens. Les Alpins montagnards Montani habitaient les montagnes des Alpes-Maritimes proprement dites. Les Montani formaient plusieurs districts tels les Intemeli, Viberti, Brigiai, Oratelli, Vesugiani ou Esubiani.

Les territoires qu’ils occupaient étaient de difficiles républiques indépendantes, ils choisissaient pour chefs les plus habiles ou les plus valeureux. « Les Ligures, » a écrit Florus, « perchés sur le sommet des alpes ou cachés dans les broussailles de leurs forêts, donnaient parfois plus de mal à les trouver qu’à les vaincre… » Il ajoute, « les Ligures sont durs, laborieux et sobres, ils ne vivent que du laitage et du fruit de leurs troupeaux. Comme ils peinent sur un sol âpre et rocailleux, ils récoltent peu de fruits et de blé. Ils construisent, sur les pentes, des murs de soutènement et y ramènent la terre végétale pour y faire quelques cultures. Ils sont braves et jaloux de leur liberté ». L’image est forte et nous replonge une fois de plus vers des origines positivistes. Mais à défaut de mieux, il nous est très difficile de retrouver des traces de ce passé. Nous savons par ailleurs quel crédit apporter aux écrivains Latins quand ils décrivent les peuples marginaux de l’Empire…

Le littoral de Nice fut colonisé de bonne heure par les Phocéens et produisit de riches cultures. On admet généralement aujourd’hui qu’ils commerçaient avec les tribus voisines et souvent plus lointaines, dont celles des Alpes toutes proches qui assuraient collectes de métaux et transferts d’objets commerciaux. Après la conquête romaine, apparut l’olivier d’abord sur la côte, qui peu à peu s’étendit dans les vallées ensoleillées.

Telle fut l’existence, tels furent, en résumé, la vie et les mœurs de nos lointains ancêtres, les Liguriens chevelus pendant les premiers siècles de notre histoire.

 

Les Ligures, grands défricheurs

 

L’écrivain de l’époque romaine, Florus, il y a déjà deux mille ans (livre II), nous apprend que nos ancêtres, les Ligures, furent les premiers à défricher le sol, alors vierge, de nos montagnes. Le travail le plus ardu, fut au cours des siècles la lente érection des innombrables murs en pierres sèches destinés à maintenir la terre arable dans des terrains souvent à forte pente. Cette technique perdure jusqu’à nos jours, même si rares sont ceux qui connaissent encore le geste nécessaire à la bonne tenue d’un mur. Les pierres nécessaires se trouvaient parfois en des endroits assez éloignés et il fallait les transporter sur le dos. La terre était ratissée et amenée, dans de grands paniers, contre le mur en construction, et aplanie du mieux qu’on pouvait. Une grande partie de ces murs a disparue, surtout dans les champs éloignés, sur les hauteurs. Ils sont recouverts par des ronciers envahissants. Et pourtant ce long et pénible travail de fourmis demanda plusieurs siècles et une grande concentration de main-d’œuvre. Nous pouvons nous demander ce que put être la vie des hommes à ces époques.

Il ne reste plus de tous ces murs que ceux des champs les plus proches du village qui ont été cultivés jusqu’à nos jours et dont le nombre ne fait que diminuer. Les pluies et les infiltrations causent de fréquents éboulements (bouires). Si le mur n’est pas réparé, le sol avoisinant se ravine inexorablement. Il y a à peine deux siècles, il existait encore une corporation dont le rôle était de construire ces murs et de les restaurer. C’était la corporation des « Bargiacaïré ». Leur métier a disparu et on ne répare plus les murettes qui s’en vont vers une ruine définitive. La campagne se meurt, on ne répare plus les murettes, et l’abandon de nos campagnes s’accentue au même rythme. Un jour viendra où les murs ne seront plus qu’un souvenir, ils auront disparu comme également, ceux qui les ont construits, ces artisans de la terre, les Bargiacaïré, qui ont tant peiné sur le sol de nos montagnes.

 

Au quartier du Villar

 

Le village actuel de Lantosque, à une altitude de 500 mètres, a été construit sur un éperon rocheux qui semble barrer la vallée, permettant tout juste à la Vésubie de se frayer un passage étroit au fond duquel elle se faufile et prend le chemin qui la conduit sur les bords de la grande bleue. Depuis de longs siècles, elle emprunte les mêmes gorges, qu’elle franchit en faisant entendre sa joyeuse chanson.

Il faut dire, d’après la mémoire orale, pour ceux qui l’ignorent, que le Lantosque primitif était bâti au quartier du Villar, au dessus des Combes et des Clapières. On a la certitude de son emplacement par la position de l’ancienne église, dont on peut retrouver quelques traces. Une croix s’élève à l’arrivée sur l’ancien hameau. Sa forme semble très ancienne, puisqu’elle ne possède aucun point de soudure, seulement des liens. Notre Centre d'Etudes a décelé, plus haut, le seul mur parementé, aux joints fin de liant de chaux (alors que tous les courtils alentours sont bâtis en pierres sèches), dont l’orientation (à l’Est) et les traces d’un retour à angle droit Nord-Sud semblent déboucher sur ce qui aurait pu être un plan d’abside. C’est par hasard que ce mur fut repéré, alors que nous nous rendions seulement visiter le site où l’on nous avait invité pour la splendeur du point de vue. Il mériterait, à notre idée, bien plus d’attention que ce simple repérage. Actuellement, ces ruines du passé disparaissent sous un enchevêtrement inextricable de ronces et de buissons épineux de toutes sortes.

Nos ancêtres vivaient là, au milieu de leurs troupeaux, leur vie agricole et pastorale. Lorsqu’un cataclysme épouvantable s’abattit sur leur malheureux « village ». La légende rapporte qu’il fut emporté par un gigantesque éboulement à la suite d’un séisme violent et dévastateur, vers 1150. A la suite de ces terribles événements, les rescapés de la catastrophe décidèrent de reconstruire le village sur son emplacement actuel. L’ancien habitat fut déserté et abandonné aux ronciers. La période correspond parfaitement au mouvement d’incastellamento connu dans toutes les régions limitrophes, et plus loin, sur un arc allant de la Catalogne à l’Italie du Nord. Ce qui nous paraît être une excellente explication au « déperchement » du village. Il nécessiterait néanmoins une plus long et précise étude.

Les seuls vestiges qui nous restent de cette cruelle époque sont les belles pierres taillées qui forment l’encadrement de la porte d’entrée de l’église actuelle. Elles proviennent, selon la tradition de l’ancienne église du Villar. Il est à noter que, au cours des siècles suivants, notamment le 15 février 1644, notre église fut détruite, une nouvelle fois, par un tremblement de terre.

 

A l’époque féodale

 

Vers le milieu du Xème siècle, ce qui devint le comté de Nice vécut une longue époque de vicissitudes et d’orages politiques, en ce temps d’anarchie féodale dont l’histoire, elle-même, nous a mal gardé le souvenir. Il n’existe pas, ou si peu, de source écrite de cette époque. D’où l’intérêt archéologique. Au début du XIè siècle, nos populations montagnardes furent plus ou moins opprimées par leurs seigneurs particuliers, qui s’étaient rendus, pour la plupart, indépendants de leurs souverains.

Parmi ceux-ci les comtes de Tende et de Vintimille, les barons de Beuil, le marquis de Dolceaqua surent profiter des troubles de l’époque. A partir de 1166, Alphonse 1er, roi d’Aragon, comte souverain de Provence, que Nice reconnu comme souverain, employa plusieurs années à consolider son autorité sur le comté de Nice.

En 1246, Nice passe sous la domination de la maison d’Anjou qui devait régner jusqu’à la mort de la reine Jeanne, reine de Naples et comtesse de Provence. Cette mort survint 1382. Le règne de la reine Jeanne – Regina Jouanna - est encore vivace dans les mémoires des Lantosquois. Sa légende s’est transmise à travers les siècles, dans les veillées de nos vieux villages.

En 1385, après sa mort, l’inquiétude renaît et, au milieu de nombreuses difficultés, Nice dut confier sa destinée à une nouvelle maison, la maison de Savoie, en la personne du duc Amédée VII, dit le rouge.

 

La Reine Jeanne

 

Vers la fin de son règne glorieux, le roi Robert d’Anjou avait perdu son unique fils Charles. Il institua pour son héritière la princesse Jeanne, l’aînée de ses deux filles. Jeanne, toute jeune encore, déjà reine de Naples et comtesse de Provence, avait reçu tous les dons aimables de la nature. Mais son règne fut longuement et malheureusement troublé, car elle était entourée de conseillers qui trompèrent sa confiance en profitant de son inexpérience. La reine Jeanne épousé son cousin André de Hongrie, qui fut assassiné en 1345. Elle épousât bientôt après, un autre cousin, Louis de Tarente. Ce qui déclenchât une guerre contre Louis de Hongrie, qui marchât sur Naples pour récupérer l’héritage de sa famille. La reine Jeanne s’enfuit et se réfugiât à Nice le 20 janvier 1348.

Après la terrible épidémie de peste qui avait obligé Louis de Hongrie à s’en retourner dans ses états, la paix fut conclue en 1352. Louis de Tarente mourut en 1362. Jeanne alors, épousât le prince Othon de Brunswick, un véritable guerrier qui aurait pu la protéger, mais ce mariage ne fit que créer de nouveaux désordres. Charles de Duras, cousin de Jeanne, mécontent de cette union, fit appel au pape Urbain VI, qui déclara Jeanne déchue de son trône et couronna Charles à sa place. Duras fit Othon prisonnier et Jeanne tomba également entre ses mains. La pauvre reine fut étouffée entre deux matelas au château de Muro, elle avait soixante sept ans.

De nos jours, la reine Jeanne est surtout connue dans nos montagnes par la légende relative à ses enfants qui auraient été massacrés par ses ennemis au château de Roccasparvièra, une nuit de Noël. Dans les veillées d’hiver, nos bonnes grands-mères ont raconté cette triste aventure. Mais la reine Jeanne n’eut jamais d’enfant, et ne vient jamais dans notre vallée, ni dans celles de nos voisins, où nous trouvons portant de nombreux ponts, passages et autres lieux en son honneur. Ses besoins financiers étaient tels qu’elle dut largement céder des « libertés » aux communes qui le payaient à prix d’or, en lui vouant une reconnaissance éternelle d’avoir accepté la suppression d’un péage…

Le château de Roccasparvièra, que la reine Jeanne avait maudit –selon la légende- a été détruit vers la fin du XVIè siècle. Voici les paroles de la prédiction que la légende prête à la reine Jeanne :

Rocca rouquina

Roche rousse

Un tèm vèndra qué su li tiou rouina
Noun cantéra plu gal, ni gallina 
Un temps viendra où sur tes ruines
 Ne chanteront plus ni coq, ni poule

Curiosité archivistique

Nous donnons, ci-après, quelques extraits, du curieux parchemin des archives de Lantosque. Ce document daté de 1388, est relatif aux statuts accordés par le Duc Amédée VII aux hommes de Sospel et de Lantosque[6]. Il serait intéressant de connaître en entier ce document qui reconnaît les franchises accordées dans les siècles précédents par les souverains d’Anjou. Le document débute ainsi :

 

« Libertés capitulaires, pactes et conventions passées entre le Duc de Savoie Amédée VII et les hommes de la viguerie de Sospel et de Val de Lantosque ainsi contenus dans l’acte de dédition l’an 1388, le 17 octobre et dans d’autres écrits.

La cour royale siégera à Sospel, et, au même lieu, le conseil général de toute la viguerie se rassemblera et sera célébré.

Le susdit Comte a promis, convenu et stipulé qu’il nous protégera et nous défendra, nous, nos personnes et nos biens à ses dépends, envers et contre tous ceux de n’importe quelle condition qui voudraient porter atteinte à nos personnes ou à nos biens.

… Il est convenu que chaque homme de bonne renommée puisse aller la nuit après le son des cloches, sans lumière…

Le susdit Comte promet à ladite communauté et aux hommes du lieu de leur fournir du sel dans la gabelle de Nice au prix qu’ils sont habitués à l’avoir anciennement excepté en cas de guerre ou ils doivent l’avoir au prix où l’auront les citoyens de Nice.

Celui qui attaquera un animal quelconque ou qui fera pâturer un animal ou autre chose de semblable dans un terrain cultivé ou dans tout autre lieu donnera cent sous et réparera en triple le dommage causé, si c’est pendant le jour. S’il ne peut payer, on lui coupera la main ou le pied. »

 

Suivent une centaine d’articles.

Ces lois, ou libertés, sont à mettre en relation avec celles connues dans les autres villages [7]. Elles sont à rapprocher des événements de la Guerre de l’Union d’Aix [8] et des statuti Modernes [9]. Elles traduisent les nécessités de se trouver un protecteur officiel, le Comte de Savoie, tout en conservant les « Libertés » qui font la République alpine si chère à nos Anciens.

 

Les routes du Sel

 

Au printemps de 1388, Louis d’Anjou vint mettre le siège devant Nice ; les niçois demandèrent du secours à leur souverain Ladislas, qui, incapable de leur donner l’appui qu’ils lui demandaient, accepte qu’ils se placent sous l’autorité temporaire d’un autre seigneur, apte à les protéger.

Nice se tournât alors vers Amédée VII, le Rouge, qui parut bientôt devant la ville et la délivra. Amédée VII vint s’établir à l’abbaye de Saint-Pons où le 28 septembre 1388, l’acte de donation fut signé devant le monastère. Il fit son entrée solennelle dans la ville le 1er octobre 1388, au milieu de l’allégresse générale.

Quelques familles nobles du comté ne se rallièrent que plus tard au nouveau souverain. Parmi elles, étaient les familles des Tournefort, seigneurs de Lantosque, de la Bollène et de Loda. Jean de Tournefort ne prêta serment à Amedée VIII, que le 16 novembre 1391.

Ce prince accepta l’offre que lui fit le gentilhomme niçois, Paganino Dalpozzo, de construire à ses frais une nouvelle route du sel, à travers les montagnes du comté, se réservant, à son bénéfice, la perception d’un droit de péage. Cette nouvelle voie devait augmenter considérablement le trafic dans nos vallées depuis Nice jusqu’au Piémont [10]. Commencée en 1431, elle fut achevée en 1434, en un temps record, pour l’époque. On peut la suivre, encore, et admirer le cheminement de cette voie dans un grandiose paysage.

Amedée VIII mourut en 1451, son fils Amédée IX lui succéda. Il ne s’occupa guère des affaires et mourut en 1473. Il consacra à la dévotion la fin de sa vie, on le surnomma : Le Béat.

 

A San Brancaï

 

Il existait autrefois à Lantosque, un établissement religieux appartenant à un ordre mineur de franciscains, appelés Pères de l’Observance. C’était des moines déchaussés dont l’installation à Lantosque remonterait au début du XIVè siècle. On raconte que ces moines sont arrivés dans notre commune vers 1394, c’est-à-dire dès le passage du comté de Nice sous la domination des Ducs de Savoie. Il semble plus vraisemblable qu’ils aient rejoint notre commune à la suite du développement de leur ordre, à partir de la maison Mère de Cimiez, vers le XVIIème siècle [11]

On pouvait encore voir et admirer cet antique témoin de notre passé, sa jolie église qui finit de s’écrouler, sous les injures du temps, en 1903. Il faut dire que les moines avaient quitté le couvent depuis la période révolutionnaire, pour tenter d’y revenir au milieu du XIXème siècle. Depuis tout a été rasé. Il ne subsiste guère que les murs extérieurs et le jardin des moines. La vieille statue de saint Pancrace, vénérée par nos pères, se trouve actuellement dans l’église paroissiale.

Le vieux chemin de Saint-Pancrace, malgré son charme et sa poésie est aujourd’hui complètement abandonné. Jadis, le couvent situé sur la route du sel, servait de relais et de refuge aux nombreux muletiers qui parcouraient cette route à grand trafic. Ils y trouvaient le gîte et même le couvert.

Nos grands-pères nous racontaient la procession annuelle de la paroisse de Lucéram pour la fête de saint Pancrace le douze du mois de mai. Les Lucéramois ont été fidèles à cette tradition jusqu’en 1880. D’autre légendes lient les gens de Lantosque à ceux de Lucéram. Nous les rappellerons plus tard.

 

Un endroit peu connu

Les Fourches

 

Dans nos précédents articles relatifs aux statuts, lois et règlements accordés en 1388 par le duc de Savoie, Amédée VIII aux habitants de la viguerie de Sospel, ainsi qu’à ceux du Val de Lantosque, reprenant les anciens statuts du XIIIème siècle, nous avons cité quelques paragraphes de ces lois qui peuvent nous donner une idée précise de la sévérité des châtiments infligés aux malfaiteurs, à cette époque lointaine.

Nous avons , par exemple, remarqué certains articles consacrés aux voleurs de bétail, disant que le coupable aurait, selon le cas, le poignet ou le pied tranché. L’atteinte à la propriété d’autrui était l’une des plus graves, dans une société économiquement fragile. Qu’elle punition fallait-il alors pour le crime plus cruel ? La peine capitale appliquée au Moyen Age, aux condamnés à mort était le supplice de la strangulation et pendaison sur la fourche. Le supplicié était laissé ainsi, en regard à son crime, et servait d’exemple à la population, habituée à pareil spectacle.

La haute justice était administrée par un viguier, c’est à dire un magistrat représentant le duc souverain. Le chef-lieu de la viguerie était Sospel. Un sous-viguier avait comme siège Lantosque. Ces deux magistrats avaient la haute main sur l’application des lois dans toute la viguerie. A l’époque Moderne, après la création du Sénat de Nice, haute cours de Justice, c’est devant lui qu’étaient traitées les affaires les plus importantes [12]. Pour les petits délits, les Statuts permettaient que la population nomme parmi ses membres celui qui représenterait la justice du souverain, appelé alors le bail. Il œuvrait comme une première instance.

On peut encore voir à Lantosque, l’endroit exact où s’élevait le gibet, où étaient exécutés les condamnés à mort. Cet endroit, belvédère magnifique, en face du village sur la rive gauche de la Vésubie, s’appelle, depuis des siècles, Les Fourches. Le gibet était visible de tous les points du village qu’il domine de toute sa hauteur. Les condamnés y étaient conduits et exécutés après une dure ascension par le vallon de la Fonlèou (« fontaine du loup »). Leurs restes abandonnés aux corbeaux, desséchés par le vent et le soleil, étaient jetés par-dessus la roche verticale au pied de laquelle la Vésubie coule en grondant. Cet endroit où se trouvaient les fourches patibulaires était regardé par nos aïeux comme un endroit maudit et conserve encore une mauvaise réputation.

 

Une triste époque, celle des Barbets

 

Les exploits des barbets ont laissé de tragiques souvenirs dans nos montagnes du Comté de Nice à l’époque de la révolution française. Lorsque les troupes françaises vinrent occuper nos vallées, les montagnards, s’organisèrent en milices, sous le nom de Chasseurs de Nice et s’opposèrent à leur avance. Ils étaient soutenus par les paysans de nos villages, qui avaient à souffrir, souvent, d’exactions et de réquisitions onéreuses et indues. Lorsque la brigade du Général Barral se mit en marche pour occuper Roquebillière (18 & 19 octobre 1792), avec pour ordre de réquisitionner partout, le Figaret, Pélasque et Lantosque ne furent pas épargnés et les populations eurent à supporter de dures réquisitions. Les groupes de Partisans se développèrent. Ils furent dès l’origine, connus sous le nom de « barbets » -barbus ? - quoiqu’ils ne méritassent pas, à ce moment là, ce nom infamant [13].

Ce ne fut que beaucoup plus tard, à la fin de la campagne d’Italie, quand le roi Victor Amédée licencia son armée que, beaucoup de ses miliciens désemparés et sans ressources devinrent de grands brigands, auxquels on fut obligé de livrer une lutte sévère.

Notons d’abord, que les barbets, si dangereux et si difficile à repérer, étaient fort nombreux. Ils se nichaient, par groupes, dans des lieux inaccessibles –Roccasparvièra, Duranus, le Breck d’Utelle, la Maïris, la Brasque- guettant le moment propice pour fondre sur les Français ou les voyageurs.

En 1796, le nombre des barbets augmenta, par le fait de l’abandon du Comté de Nice par Victor Amédée et du licenciement forcé des milices. Beaucoup de déserteurs vinrent grossir les rangs des barbets et les choses empirèrent tragiquement. Nous pouvons les rapprocher alors de groupes de guerrillas, que la propagande française s’efforça de minimiser.

Ce ne fut qu’en 1810 qu’on, mit un terme aux agissements de barbets. Du 11 au17 août, une battue fut organisée par le général Garnier, elle assura la capture de la bande qui semait la terreur dans la vallée de Lantosque…

 

Les Barbets : une nuit tragique

 

« Par une soirée obscure et pluvieuse de novembre 1794, à la nuit tombante, une patrouille française comprenant quatre hommes et un sergent vint frapper à la porte d’une maison de campagne située dans un vallon solitaire. Devant les coups répétés, une femme apeurée et tremblante, vint accueillir les arrivants, qui disaient s’être égarés et lui ordonnaient de les recevoir pour le reste de la nuit. La femme, tremblante, les laisse entrer dans sa pauvre cuisine,  où un maigre feu brûlait qui éclairait chichement la pièce. Elle avait auparavant commandé à sa fille de monter se coucher.

Les militaires se mirent en mesure de s’installer du mieux qu’ils purent et déposèrent leurs fusils dans un coin, après avoir demandé à leur hôtesse d’un soir si elle ne pouvait pas leur fournir de quoi se restaurer. La pauvre femme se plaignit de la dureté des temps et leur avoua de ne disposer d’aucune nourriture. Au même moment, la porte s’ouvrit donnant passage à deux hommes, le père et le fils, lesquels trempés de pluie, déposèrent sous l’escalier leur hache et leur bissac et s’approchèrent du feu. Puis le père, un robuste gaillard, commanda à sa femme de faire griller une poilée de châtaignes et d’apporter un peu de vin, qui serait le bienvenu.

Quand tout cela fut terminé, chacun s’installa à même le sol, pour pouvoir dormir. Mais en pleine nuit, sur un signal du maître de céans, sans bruit, les fusils furent enlevés. S’armant de leurs haches, nos deux paysans massacrèrent les cinq militaires qui n’eurent pas le temps de se défendre. Le reste de la nuit se passa à transporter les cadavres dans le proche vallon fortement grossi par les pluies, où ils disparurent rapidement. »

Voilà la tragique histoire que racontaient, à la veillée, nos bons grands-pères. Tristes souvenirs d’une non moins triste époque !

 

Nos moulins

 

Lantosque a mené, autrefois, comme la majorité de nos communes montagnardes, une vie prioritairement pastorale et agricole. Bien entendu, le progrès aidant, ce côté poétique de la vie pastorale d’autrefois à presque totalement disparu à l’heure actuelle. Il est bien vrai que le modernisme n’épargne rien.

L’industrie ancestrale elle-même a subi ses attaques et, quand nous disons industrie, nous voulons désigner, modestement, les ateliers de nos vieux meuniers et forgerons qui jouèrent un rôle de premier plan dans la vie de notre village. Ils nous apparaissent dans nos archives dès le XIVème siècle [14], puis de manière plus précise au siècle suivant [15], tant communaux que privés.

Il avait à Lantosque trois établissements de ce genre [16] :

Le premier à cessé toute activité depuis un demi-siècle. Il appartenait à la famille BRUN. Il comprenait : Un martinet –gros marteau de forge mu par une chute d’eau- et un moulin à foulon. Là nos aïeules apportaient leurs draps de laine que le tisserand avait tissé pour y être foulés, assouplis par le marteau qui les débarrassaient des inégalités dues au tissage. C’était le travail du « Paraïré ».

Un second établissement similaire était celui de la famille GUIGO. Il comprenait deux martinets à forge et plusieurs moulins à grain. Ces moulins travaillaient toute l’année, presque sans arrêt, transformant le blé, le seigle ou le maïs en farine de qualité.

Il existait encore de nombreux moulins à huile, dont un est construit en 1686, jouxtant les autres moulins communaux, et profitant du même beal, du même canal d’amené de l’eau nécessaire à son fonctionnement [17].

Mais l’activité de ces moulins n’est plus. On ne verra plus les mulets et les ânes attendant, patiemment, les précieux sacs, pendant que les coups répétés du martinet emplissaient l’air de leur joyeux tintement.

Profitons de l’occasion, qui se présente à nous, pour accorder ici un souvenir affectueux, aux deux pères Guideau Félicé et Guigo Eugène, ces deux forgerons du passé, travailleurs honnêtes et consciencieux, qui n’avaient qu’un souci : bien faire ce qu’ils faisaient.

 

Pénitents blancs - Pénitents noirs

 

Au début du XIIIème siècle, on assiste depuis l’Italie du Nord, à une importante éclosion de confréries religieuses. Les Terres Neuves de Provence n’échappent pas à ce mouvement et, Lantosque pour sa part, voit naître deux confréries qui ont vécu et prospéré jusqu’au début du XXème siècle où elles ont disparu. La première, la plus importante, fut sans nul doute celle des pénitents noirs, ou frères de la Miséricorde [18] dont le siège était la chapelle du centre du village, face à la mairie actuelle.

Il est intéressant de compulser les statuts des pénitents blancs, qui tinrent un rôle primordial dans la vie publique de notre village au cours des siècles. Cette compagnie s’intitulait « Arciconfraternita de disciplinanti del luogo di Lantoscas comtade di Nizza agregata (affiliée) al Gonfalone di Roma ». Les états de cette compagnie pour l’année 1621 portent 145 membres inscrits, parmi lesquels se retrouvent tous les noms patronymiques de nos familles actuelles sous leur consonance latine ou italienne. La confrérie était administrée par un prieur et un sous-prieur, deux conseillers, deux massiers et un comptable. Ce bureau était élu, chaque année, le lundi de Pâques. A la fondation des statuts, les deux premiers prieurs furent A. Thaon et Claude Auda [19].

L’habit des pénitents comprenait une chape blanche munie d’un capuchon de même couleur et d’un cordon à sept nœuds formant ceinture. La compagnie a été de tout temps l’animatrice de la vie de nos ancêtres, rôle surtout religieux, mais aussi rôle dans la vie sociale et humanitaire.

Depuis le XIIIème siècle, dans des temps où l’assistance sociale était inconnue, à des époques où les disettes étaient fréquentes, la Compagnie savait se pencher sur les malheurs du peuple. Elle créa un mont granatique (monte-granatico), qui consistait à accumuler une réserve de grains à distribuer à tous les malheureux dans le besoin. C’est sans doute là l’une des origines fondatrices des pénitents, appelés parallèlement Ellemosine, Aumônes. Les blancs sont à l’origine de notre hôpital hospice, construit le 2 avril 1621. Cet hôpital fonctionne encore de nos jours. La confrérie fit l’acquisition, par voie d’échange, d’un local appartenant à Nicolao, au quartier du Pivol en face de la chapelle, local qui a toujours été occupé.

 

Notre vieux langage

 

Quel était le langage de nos pères aux premiers siècles de notre histoire ? Nous pouvons imaginer que le langage primitif des premiers occupants de notre comté fut composé de grecs et de celtiques. Plus tard les conquérants romains, en vainqueurs, y apportèrent et y imposèrent le latin vulgaire. Mais même cette langue « universelle » se plia aux nombreux emprunts et aux adaptations que lui firent subir les peuplades locales.

Ensuite les invasions barbares y laissèrent des traces de leurs dialectes particuliers. Il en résultat de tout cet amalgame, le provençal primitif composé de plusieurs éléments où prédominait le latin. Dans les siècles qui suivirent, notre idiome Nissart, et plus précisément pour nous gavuot, fut très influencé par les langues espagnole, italienne et française. Nous devons noter aussi la grande influence du provençal que les troubadours surent si bien perfectionner.

Notre langue maternelle est un mélange basé sur le latin, l’italien et le provençal. A Menton, le patois renferme beaucoup de mots génois. A Grasse, le provençal a subsisté. Mais dans nos vieux villages montagnards, le langage courant est un patois très voisin du dialecte Nissard, exception faite pour beaucoup de finales qui se prononcent différemment, en conservant la forme archaïque, exempt d’italianismes.

Toutefois, il y a lieu de constater que notre langage se modifie lentement mais sûrement, tous les jours, au gré des circonstances, des événements. De vieux mots disparaissent, remplacés par d’autres mots nouveaux adoptés par la masse. De nouvelles expressions apparaissent et voient le jour en ce siècle de progrès toujours renouvelés. Il est certain que lorsqu’on entend notre patois actuel on se rend bien vite compte des changements apportés par le temps et la mode.

Nos grands-pères ne connaissaient que leur dialecte local et l’employaient même dans leurs réunions officielles. Les nouvelles générations ne le parlent pratiquement plus, et il ne sera bientôt plus qu’un souvenir.

 

LA LANTOSQUOISE

 

Dominant la Vésubie
A cheval sur son rocher,
C’est Lantosque la jolie
Qui dresse son fier clocher

 REFRAIN :

Aimons bien ce vieux village,
Doux pays de nos amours,
Répétons à tous les âges :
Lantosquois, Lantosquois toujours.

 A ses pieds le torrent gronde,
Et serpente entre les prés,
Dans ce joli coin du monde
Lantosquois,  nous sommes nés.

Voici notre vieille église
Témoin de notre passé,
Vieilles rues et maisons grises
Du Pivol, de Saint André

Au berceau de notre enfance
Qui a vu nos premiers jeux,
Nous gardons tous, l’espérance
De finir des jours heureux.

Au déclin de notre vie,
Attendons le dernier jour
Dans la petite patrie
Qui nous donné le jour.

REFRAIN :  
O Lantousca, bel villagé
A tu pènsa cada giou, 
E cantan, plèns dé couragé :  
Lantousquiès, Lantousquiès, tougiou.
O Lantosque, beau village
A toi pensons chaque jour,
Et chantons, pleins de courage :
Lantosquois,  Lantosquois, toujours

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[1]  - Daniel MERCADIER, Trésorier de l’Association Montagne et Traditions, est ébéniste (La Varlope) à Roquebillière

[2]  - notre Centre d'Etudes vient d’en apporter la preuve scientifique définitive (cf. sondage archéologique de l’ancienne chapelle Saint-Nicolas d’Andobio, après Saint-Martin-Vésubie)

[3]  - cf article dans ce volume

[4]  - pour les Grecs de la côte et les Romains, le terme de ligure correspond à celui de barbare, c’est à dire « ceux qui n’appartiennent pas à LA civilisation » - entendons la leur. On ne peut donc y voir le déterminant d’un véritable « peuple »

[5]  - cf les travaux anciens de J.P. POLY et plus récent de M. ZERNER (C.E.M de l’U.N.S.A.)

[6] Traduction de Charles Février.

 

[7]  - BOYER J.P. Hommes et Communautés …. Nice, 1990

[8]  - VENTURINI A. in La Dedition…

[9]  - cf études de GILI E. sur Saint-Martin-Vésubie

[10]  - H. MOUTON La Route du Sel, Ed. Serre, 1996

[11]  - GILI E. « Le Monastère de … »

[12]  - A.D.A.-M., Série B, n° 258 - Sénat de Nice. Affaires criminelles. Sentences rendues à la requête du fisc royal contre Barthélémy MAGNETTI de Lantosque, condamné pour meurtre commis dans les conditions les plus atroces sur un bûcheron, à être attaché à la roue  jusqu’à ce que la mort s’ensuive, puis à un gibet dans le bois de La Moeris.

[13]  IAFELLICE Les Barbets, Serre, 1999, donne sans doute la meilleure vision du phénomène. Richement documentée, cette étude rappelle que le nom même de Barbet était connu lors des guerres Gallispanes, au milieu du XVIIIème siècle.

[14]  - A.D.A.-M., Série E dépôt 78, sous-série DD / Ce sont les seigneurs de la famille TORNAFORTE qui en détiennent les droits, mais les cèdent progressivement à la Commune. C’est d’ailleurs en cette occasion que les moulins nous apparaissent, ce qui prouve qu’ils existent déjà depuis sûrement longtemps.

[15]  - A.D.A.-M., Série E dépôt 78, sous-série DD (divers pièces)

[16]  - A.D.A.-M., Série E dépôt 78, sous-série FF riche en information à ce sujet

[17]  - A.D.A.-M., Série E dépôt 78, sous-série FF 81

[18]  - A.H.D.N. Cette confrérie est connue à Lantosque dès 1490. D’autres confréries existaient, en dehors des Pénitents, qui prenaient la forme de Confréries de Dévotion : Rosaire, Saint-Esprit, Saint-Sacrement…

[19]  - A.H.D.N. Au XVIIIème siècle, on parle même de prieuresses de la confrérie des Pénitents blancs

 


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