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SAMEDI 17 MAI 2008 Instruits par la foule des visites précédentes, ils avaient bien fait les choses, à Belvédère : une banderole "Départ", les médias, les… comment ? Qu'est-ce-que vous dites ? Ce n'était pas pour nous ? Vous êtes sûrs ? Bien sûrs ? Ah bon, je croyais… En tout cas la visite a bien eu lieu, pour le plus grand bonheur de la petite vingtaine de participants (dont deux couples de fidèles des visites de l'AMONT, venus spécialement de Nice !) qui avaient bravé pluie et brouillard. À 14 heures, heure dite, ils se pressaient sous le porche de la Mairie, accueillis par le grand sourire d'Yvette MORIN. Prélude historique, esquissé à grands traits mais qui permet de bien resituer les luttes médiévales et la difficulté pour les seigneurs, de toutes sortes (de Provence, de Vintimille, Grimaldi de Beuil), à soumettre ces populations frondeuses. À la sortie de ces guerres, il reste dans tout le Val de Lantosque un seul castrum ; il est sur le territoire de Belvédère, approximativement au Planet actuel. La pluie cessant un instant, on en profite et on continue l'Histoire in situ. Du plateau des Condamines, au pied du castrum, la population vient s'installer peu à peu là où est le cœur du village ; deux linteaux gravés témoignent de cette époque, ainsi que le clocher de l'église Saint-Pierre et Saint-Paul, daté du XIVème siècle. Belvédère, au sommet de la croupe qui le porte, est un village construit "en courbes de niveau" : des niveaux, à peu près horizontaux, de rues très étroites, perpendiculaires à la pente (on en verra un bel exemple plus loin, à propos de la chapelle saint Antoine), et des passages pentus, étroits et souvent voûtés, eux dans le sens de la pente, et qui font se rejoindre ces rues. Bref un dédale dans lequel on se verrait bien se perdre… Petit salut amical au lion débonnaire, qui distribue l'eau amenée par le canal du Moulin et l'on se rend à l'église, construction baroque dont la façade, initialement alignée sur le clocher, a été reculée dans les années 1950 à son emplacement actuel pour permettre de grands travaux d'ancrage de l'ensemble du bâtiment de l'église, qui avait tendance à vouloir glisser dans la pente et rejoindre Roquebillière ! Horreur !
L'intérieur, et notamment le maître-autel est stupéfiant, même pour qui n'aime pas le baroque : on croule sous les dorures, les torsades, les angelots et autres personnages ; dans les alvéoles, à droite et à gauche, les deux saints patrons de la paroisse veillent sur les fidèles. Et, pour faire bonne mesure, les reliques authentifiées de saint Blaise, le saint guérisseur des maux de gorge, ainsi que le banc réservé à la famille Rainardi (ou Raynardi) qui prétendit, comme tant d'autres, imposer sa loi au village et qui lui a légué son blason. Deux choses encore : une magnifique chaire, malheureusement déposée, à superbe décoration naïve et une étonnante, et émouvante plaque à la mémoire des morts de 1914-18, avec les photos. Puisqu'on est dans le religieux, poursuivons avec les chapelles ; Belvédère en a compté jusqu'à une dizaine, dont beaucoup ont disparu, mais dont certaines sont toujours debout et utilisées, comme Saint-Blaise sur la route de la Gordolasque, la chapelle du Planet, ou encore Saint-Antoine, magnifique petite chapelle ouverte et protégée de la rue par un croisillon de bois ; la beauté des quelques fresques que la dégradation de l'enduit laisse entrevoir fait regretter qu'une campagne de réhabilitation/restauration ne soit pas lancée. De Saint-Antoine on revient vers le centre du village, en suivant l'une de ces rues à l'horizontale dont je parlais plus haut, et l'on fait halte dans l'ancienne laiterie coopérative, qui abrite aujourd'hui le Musée du lait. Ce bâtiment, ainsi que nous l'indique Yvette, est un ancien moulin, dont les meules tournaient grâce à l'eau du béal ; cinq moulins, des scieries, une forge à martinet constituaient la petite industrie nécessaire à la vie d'un village, très centré sur une mise en valeur agro-pastorale : à la fin du XIXème siècle, Belvédère compte plus de 450 bovins, plus de 600 ovins, 400 porcs, quelques dizaines de chèvres, cheptel auquel il faut ajouter les chiffres considérables de la transhumance vers les pâturages de la Gordolasque : plus de 6500 ovins, près de 1800 chèvres… Très intéressant petit musée, qui aux outils et documents relatifs au traitement du lait joint d'autres outils de la vie rurale ; c'est qu'à Belvédère on a aussi cultivé la lavande, fabriqué le miel en quantité, élevé les cocons à soie. Yvette nous présente, à partir de quelques très belles photos dont elle est l'auteur, diverses traces et inscriptions laissées sur des rochers autour du village ; bornes pour certaines, non déchiffrées pour d'autres ; elle règle avec jubilation son compte à Napoléon Ier, mort depuis longtemps au moment où est tracée une inscription censée commémorer son passage à Belvédère (sic ! ), et décrypte pour nous l'inscription laissée par des troupes de Napoléon III, sans doute en manœuvre dans ce pays nouvellement annexé. Retour vers la mairie, Monsieur le Maire nous y attend pour un verre de l'amitié très apprécié de tous. En repartant du village, la brume montante transforme le paysage en "Montagnes Célestes" ! Décidément, cette Vésubie est pleine de surprises… |
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