1. Organigramme explicatif des milices communales.
p. 90
2. La langue. p. 91
3. Comment mettre fin aux agissements des barbets.
pp. 92-93
4. Les lieux de mémoire. p. 94
5. Mémoire et musique : J.-L. SAUVAIGO « Lalin » ;
Th. CORNILLON, « Laoust », In Prals ; A.
STEVE « Bello Nanoun ». pp. 95-97
6. Inscriptions et mémoire : tract « 1792 – ne pas
oublier – 1992 » ; plaque commémorative de Gilette, 1993. p. 98
Bibliographie de l’exposition. p. 99
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Histoire des
langues

Propositions de mesures pour la destruction des barbets
A.D.A.-M., Série L 0164
(3)
Aspremont,
12
ventôse, An IV.
JACQUEY, Capitaine à la 104ème ½ brigade, commandant du poste
d’Aspremont, au Représentant du Peuple, envoyé près les Armées d’Italie et
des Alpes.
« Citoyen Représentant,
depuis plus d’un mois que je commande ici, je n’ai rien négligé pour
découvrir et surprendre les brigands qui portent par tout le canton la
destruction et le meurtre. J’ai parcouru les différents points de son
arrondissement à la tête de toutes mes patrouilles ; j’ai joint mes forces
à celles du commandant de Levens pour repérer de concert, et toutes les
mesures n’ont servi jusqu’à ce jour qu’à démontrer l’insuffisance de nos
moyens. J’ai étudié le caractère des habitants, apprécié la sensation que
leur font tant d’horreurs ; j’ai reconnu que la crainte d’être eux-mêmes
massacrés s’ils en découvraient les auteurs était la seule cause de leur
discrétion et de leur silence, et j’ai conclu qu’ils n’étaient que trois
moyens de purger ces montagnes des brigands qui les infestent.
Le
premier serait d’envoyer ici une force militaire de 100 hommes au moins.
Le
second, de mettre à prix la tête des brigands.
Le
troisième, enfin, d’armer tous les paysans d’une moralité irréprochable et
d’une probité reconnue. Cet armement se ferait d’après le choix et sous la
responsabilité des corps municipaux, car c’est ici la lutte du terrorisme
contre la vertu paisible et désarmée.
Enjoignons ensuite, représentant, par un arrêté sage et sévère, à tous les
citoyens armés de se renfermer scrupuleusement dans le cercle de leur
propriété et de ne jamais l’enfreindre avec leurs armes, sans en être
requis d’avance par leur municipalité ou leur commandant militaire, sous
peine d’être eux-mêmes déclarés brigands et punis comme tels.
Dès
lors, nous aurons des délateurs, des guides et même une force armée mus
par quatre ressorts bien puissants : l’appât de récompenses, le désir de
conserver leur vie et d’affranchir leur propriété, la soif de la vengeance
et même l’amour du bien public, que ne comprimera plus la crainte.
Nous pourrons vérifier, dans nos courses, si l’on est fidèle à notre
arrêté, si l’on reste disponible aux opérations imprévues ; nous pourrons
cerner, fouiller tous les répères par des sentiers secrets que connaissent
les seuls habitants, et bloquer les brigands le premier jour même de la
distribution des armes, de manière à ce qu’il n’en échappe pas un.
Je
vous salue respectueusement en attendant votre réponse.
JACQUEY, Aspremont, 12 ventôse An IV.
Lettre relative aux Barbets
A.D.A.-M., Série L 0163
Les
excès que commettent les Barbets augmentent à un tel point, qu'il est du
devoir de tout bon citoyen de proposer des vues sur les moyens de les
extirper.
Il est
hors de doute que ces gens-là reçoivent asile des paysans éparpillés dans
les montagnes et même de quelques habitants dans les villages. Aussi on
devrait tâcher de connaître ceux qui leur donnent du secours et, pour y
parvenir, il faudrait tâcher de trouver dix à douze hommes affidés, qui ne
se connaîtraient pas même l'un et l'autre, et à qui on promettrait une
forte récompense; ces personnes feindraient de déserter et, en parlant aux
paysans qu'ils trouveraient sur les montagnes, on trouverait bien vite qui
leur indiquerait ; ou bien joindre les Barbets, s'ils en témoignent
l'envie, et alors ces personnes seraient à même de faire toutes les
opérations nécessaires, verraient leur lieu de rendez-vous,
reconnaîtraient les personnes qui les secourent, et, quand ils auraient
pris tous les renseignements en leur pouvoir, pourraient s'évader pendant
la nuit et rendre compte au poste le plus prochain.
Il y a
des soldats en état d'arrestation à Roquebillière pour des fautes très
légères, et qui seraient très propres pour faire cette opération, vu
qu'ils pourraient facilement faire croire qu'ils étaient mécontents; et
même le commandant de la place, nommé DIJOT, relevé depuis deux jours,
m'avait dit qu'il y avait des personnes qui leur avaient conseillé de
joindre les Barbets, et je lui avais conseillé de prendre le parti
ci-dessus.
Outre
cela, il faudrait que chaque municipalité donne une liste exacte de tous
les citoyens absents et de leurs parents dans le village, et, sur cette
liste-là, on verrait qui sont ceux qui sont avec la troupe piémontaise ou
résident notoirement dans un pays étranger. Toutes les autres familles qui
ont des époux ou des fils dehors, dont ils ne peuvent indiquer la
résidence donneraient lieu à suspecter qu'ils rôdent aux environs, et on
pourrait ordonner à ces familles de venir demeurer à Nice, et, par là, on
ôterait une ressource aux Barbets. Par exemple, je connais une famille de
paysans
à
Roquebillière dont le père et le fils sont absents, et cependant tout
indique qu'ils sont parmi les Barbets, et on ne peut pas le prouver. Il
tournerait plus à compte à la République de les nourrir ici que de leur
permettre de faire du pain pour les Barbets.
Car il
faut observer que des personnes qui mangèrent avec les Barbets il y a
environ quinze jours par force, dirent qu'ils avaient du beau pain blanc
et frais.
La
brièveté du temps et le moment inopiné dans lequel j'écris ceci ne me
permet pas de dire davantage sur ce sujet ; mais je donnerai en tout temps
tous les renseignements en mon pouvoir.
Je
demande seulement qu'on ne me découvre pas à personne, car ce serait me
mettre dans le cas de ne pouvoir plus être utile.
Louis Fatio (s. 1. n. d.)
Les
lieux de mémoire des Barbets
(4)
Localisation |
Nature |
Description |
|
Monument |
Ossuaire surmonté d’un d’obélisque commémorant
les soldats de l’Armée d’Italie tombés en 1793-94. Il fut édifié en
1901 par les chasseurs alpins du 22èmeBCA.
|
|
Lieu dit |
Le « saut des Français » à pic d’où les Barbets
précipitaient leurs prisonniers français.
|
|
Ex-voto |
Tableau évoquant la grâce reçue par un soldat
français lors des combats de 1793.
|
Gilette |
Stèle |
L’inscription controversée rend hommage aux faits
d’armes de soldats français pendant la bataille de Gilette.
|
Levens
|
Fresque |
Décoration de la salle des Mariages et du Conseil
évoquant la vie de MASSENA.
|
Moulinet
|
Ex-voto |
Monument en pierre évoquant la grâce reçue par
Dominique TRUCHI en 1799.
|
Saint-Martin du Var
|
Boulets |
Boulets offerts par le général DUGOMMIER
enchâssés dans la façade de l’église.
|
Musique et mémoire : les ballades
(5)
Traduction
La Balade de François FULCONIS qu’on appelait Lalin
(Jouan Lùc SAUVAIGO)
Daignez accepter ici la triste histoire
De François FULCONIS qu’on appelait
Lalin
Ils lui ont volé l’honneur et sali la
mémoire
Et c’est justice de chanter son destin
Beau et habile, il y a un tailleur à
l’Escarène
La clientèle vient jusque des autres
vallées
Il est intelligent et se donne de la peine
Oui, Choa FULCONIS est un homme de
bon sens
REFRAIN
Ecoutez le destin de François FULCONIS
qu’on appelait Lalin
Il s’est marié mais la guerre éclate à
nouveau
C’est l’ouragan de cette année 92 (1792)
La France occupe, « civilise » et empoche
A la disgrâce ne s’ajoute que la tricherie
Une saloperie d’officier de cette
soldatesque
De François FULCONIS déshonore l’épouse
Un homme droit se venge de vilenie
En François FULCONIS naît Latin, le
barbet
REFRAIN
Vous avez tenu, miliciens de la Contea
Pendant cinq ans entre Saorge et
Saint-Martin
Mais sur la crête s’évanouit l’épopée
De ces vaillantes brigades, c’est ainsi
Prince de Savoie, traître, vous abandonne
Le 28 avril de 96
A l’ennemi sans foi qui vous hait
Avec les résistants, aucune pitié, aucune
loi
REFRAIN
Un jour que l’Etat Major français faisait
bombance
Lalin,
vêtu d’un uniforme d’officier
S’est invité plein d’audace. Par dévers soi
Il se moque et ainsi attend le café
Puis en cachette il emporta l’argenterie
Leur laissant sous l’assiette un billet :
« bâtards, vous payerez vos tromperies
Mort aux Français ! »
Signé de Lalin le barbet
REFRAIN
Les Français le cherchent partout
Mais aucun piège
N’a jamais pu attraper Lalin, barbet
d’honneur
Il se déguise, il a tend de ruses qu’ils
laissent pantois
La Garde Nationale, « blanche » de terreur
Il a tant d’audace, il se moque et défie
Que l’occupant, à force, trouve la brebis
galeuse
Pour des promesses d’or, le judas se décide
C’est son plus proche ami qu’on surnomme
Chichoun
REFRAIN
La vieille Parpaniacca porte la nourriture
Le traître, dans un barillet, verse le
poison
Les barbets mangent, boivent, mais Lalin
s’endort
Chichoun tire la tête ! un coup et puis
plus rien
Lié sur une mule, ils l’ont descendu à Nice
Malgré sa mère qui pleurait de douleur
La République pour nous faire sienne nous
brise
D’une nation elle efface l’esprit et
l’honneur
REFRAIN
Pour ma part, il me semble qu’il fallait
pour l’histoire
Que les barbets fussent traités d’assassins
Sinon comment justifier la victoire
Des renégats, des traîtres et des
saboteurs ?
Tant d’autres sur la crête sont partis
Comme FULCONIS que l’on appelait Lalin
Ils lui ont volé l’honneur et sali la
mémoire
Justice soit de chanter son destin
Lavoust
(Thierry CORNILLON)
Lavost
Avètz sentit ‘quela cançon
Que cantan toi en cada maijon
L’estoria de Carlo un ome de damont
E dei Barbets dins tot lo
canton
Tant n’avia de companhons
D’amics e d’autres aqui n’amont
Que de fracès n’a tuat sensa perdon
Lo pais entier n’èra la sieu rason
De la guerra, de la preson
S’es trach per viure mé la sason
Laurar la terra e semenar damont
Sensa ren dire dal morre dei canons
De Lavost a Berthemont
Restan li leris de la maijon
Lo cor tendre de la bèla Loison
Lo bel caire d’aquel pichin garçon
Th. CORNILLON In Prals, extrait de l’album
Cants d’en amont |
Lavoust
Avez-vous entendu cette chanson
Qu’on chante dans chaque foyer ?
L’histoire de Charles, un homme de la montagne
Et des « Barbets » dans la région.
Il en avait des compagnons,
Les amis et les autres de là haut,
Que de Français il a tué sans remords !
Tout un pays était son idéal
La guerre et la prison
Il en a réchappé, pour rejoindre la nature
Labourer et semer la terre, là-haut,
Taisant au fond de lui l’écho des canons
Il ne reste plus que la légende
Le cœur tendre de la belle Louise
Et le rocher de ce petit garçon. |
Toni BALONI
Bello Nanoun
« Oh ! Nanoun ! Bello Nanoun !
Un brodou de couilhouns de mouninos !
Oh ! Nanoun ! Bello Nanoun !
N’aven jamai que lai mans per plourar !
Bello Nanoun ! Bello Nanoun ! Bello Nanoun ! » |
Inscriptions et mémoire
(6)
1.
Tract
1792 – Ne pas
oublier – 1992
Il y a deux
siècles, le 28 septembre, les hordes révolutionnaires
françaises du
général D’ANSELME envahissaient le Comté de Nice
(alors Province
du Royaume de Sardaigne), pillaient détruisaient
nos villes, nos
villages, profanaient nos églises, torturaient,
déportaient,
massacraient nos aïeux.
Il est de notre
devoir de ne pas oublier, de se souvenir et de
rendre un
hommage solennel à la résistance et auX combatS acharnés
des troupes
sardes du général niçois THAON de REVEL, à la lutte
héroïque des
Barbets, ces paysans, ces bergers de nos campagnes,
de nos
montagnes, défenseurs de la foi catholique, des libertés
de leurs
terroirs et fidèles à leur roi, et à tous les martyrs
du pays niçois,
victimes innocentes de la Révolution française
et de sa
barbarie.
Une communauté
sans mémoire ou qui renie son histoire et ses
traditions est
une communauté inerte sans avenir.
Patrice GASTAUD
délégué local (Sospel-Moulinet)
du Comité du
Souvenir
des Barbets du
Comté de Nice
2.
Plaque de Gilette
Place de la
Bataille de Gilette
Les 18 et 19
octobre 1793,
sous les
oliviers de la République,
les soldats du
Général DUGOMMIER,
les chasseurs
corses du commandant GIUSEPPI,
les gardes
nationales d’ALZIARI-ROQUEFORT,
le 28ème
de ligne du sergent EBERLE,
repoussent
l’ennemi,
préservant le
Comté de Nice
de l’invasion
Austro-Sarde
Alpes-Maritimes, Sutra et Montenote, au
temps des premiers préfets (all’epoca dei prefetti napoleonici,
exposition A.D.A.-M. et de l’Archivio di Stato, Nice, 2000
Les Alpes-Maritimes de la Révolution à
l’Empire, exposition A.D.A.-M.,
Nice, 2000
1792, le Comté de Nice et la Révolution,
in Nice Historique, n° 3-4, 1992
Ouvrages
BAUDOIN E. – SAUVAIGO J.-L. Lalin,
Z’Editions, 1997
COMBET J. La Révolution à Nice, Rééd.
Serre, 1988
DERLANGE M. (sous la Dir. ) Les Niçois
dans l’Histoire, Privat, 1988
GARINO P.-R. Aspremont, Castagniers,
Colomars. Crounica dei Aspermontan, Catagnerenc e Couloumassié, Serre,
1992
GARINO P.-R. Duranus, autrefois
Rocca-Sparviera. Crounica dei Barbetaire, Serre, 1993
GONNET P. – PERONNET M. La Révolution
dans les Alpes-Maritimes, Horvath, 1989
IAFELICE M. Barbets. Les résistances à
la domination française dans le pays niçois (1792-1814), Serre, 1998
MUSSO A., F. et J Roquebillière, notes
d’histoire, Serre, 1981
RAIBERTI L. Saint-Martin et la Madone de
Fenestre, Serre, 1983
REZIO L. Notables et vie villageoise à
Belvédère, Valdeblore et Saint-Martin-Vésubie. 1770-1814, Mémoire de
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Articles
BARELLI H. « Les Niçois dans les armées
pendant la Révolution (1792-1794) », in Nice Historique, n° 3-4,
1992, pp. 127-136
CANESTRIER P. « La conquête et l’occupation
de la ville et du Comté de Nice sous la Révolution », in Nice
Historique, janvier-avril 1931, n° 1 et 2, pp. 46-72
CARLIN M. « L’introduction de la
législation révolutionnaire dans le Comté de Nice. Un exemple : le droit
familial », in Nice Historique, n° 3-4, 1992, pp. 163-166
CAUVIN F. & GAZIELLO F. « Les Niçois morts
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CLEYET-MICHAUD R. « Entre France et
Piémont, le Comté de Nice, un pays en guerre (1792-1794) », in Nice
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COSTAMAGNA H. « 1792, un essai de défense
du Comté de Nice sur le Var et son échec », in Nice Historique, n°
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DERLANGE M. « L’émigration des Niçois
pendant la Révolution », in Nice Historique, n° 3-4, 1992, pp.
179-184
GONNET P. « L’acceptation de l’héritage
révolutionnaire sous bénéfice d’inventaire », in Nice Historique,
n° 3-4, 1992, pp. 191-196
HILDESHEIMER E. « En 1792, l’armée
française entre à Nice », in Nice Historique, n° 3-4, 1992, pp.
115-125
ISSOART P. « L’Abbé Grégoire à Nice », in
Nice Historique, n° 3-4, 1992, pp. 197-205
MASSOT M. – VERAN D. « Les délibérations de
la Société Populaire de Nice (1792-1795) », in Nice Historique, n°
3-4, 1992, pp. 218-220
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Mattone di Benevoello d’après sa correspondance administrative (novembre
1792 – avril 1794) », in Nice Historique, n° 3-4, 1992, pp. 221-228
RIPART L. « Compte-rendu de IAFELICE M.
Barbets », in Recherches Régionales, n° 150, 1999, pp. 96-102
SAPPIA H. « Les Barbets de nos Alpes », in
Nice Historique 1905 p. 296, 308 ; 1906 p. 13, 26, 44, 54, 92, 144,
192, 210, 239, 285, 304 ; 1907 p. 26, 41, 76
|